Les rouleaux à plots fonctionnent sur le principe cinématique du déplacement d’une charge par roulement et pivotement associés.
Leur mise en oeuvre est simple mais doit se faire avec précision à la fois dans la dimension et le placement des dispositifs sur le chemin de progression.
Dimensionnement:
Les constructeurs n’avaient pas toute liberté pour dimensionner les rouleaux, car il y avait un impératif, imposé par la montée à la volée des blocs sur le plateau du monte charge, qui limitait la longueur totale du chariot support des blocs à 1 m de longueur.
Un rouleau à 9 plots de 10 cm de diamètre avec un rayon de sphère du plot de 3 cm pour toutes les pierres de remplissage et du parement, charge utile 2 t / rouleau. et un rouleau à 11 plots sur la périphérie, de 10 cm de diamètre 3 cm de rayon de sphère du plot et 8 anneaux de 11 plots distribués sur la longueur du rouleau acceptant une charge de 6 t par rouleau
Avec ces dimensionnement, l’effort pour démarrer le mouvement est de 1 KN par tonne de charge, la résistance au roulement est théoriquement, si les surfaces étaient parfaites, de 0.5%.
Gestion des rouleaux:
Naturellement stables les rouleaux auraient très bien pu être répartis régulièrement le long des pistes horizontales en attendant que les charges leur passent lentement dessus.
Néanmoins pour 100 m de parcours il aurait fallu probablement disposer de l’ordre de 200 rouleaux sur la piste.
Dans ces conditions les rouleaux avancent avec les charges, quand la charge avance de 1 m les rouleaux avancent de 0.5 m, il faut donc recueillir ceux qui arrivent en bout de piste pour les replacer au départ en les faisant rouler sur une piste parallèle.
Mais on comprendra plus loin que sur l’assise, comme dans la traversée de la galerie d’accès au monte charge, les blocs devaient prendre de la vitesse, donc être lancés sur une rampe descendante, dans ces conditions, ( voir la vidéo de la maquette)
des rouleaux seuls auraient suivi les blocs dans leurs déplacements en créant une grande pagaille!
Il fallait donc trouver une solution de gestion des rouleaux ce fut:
Le patin autonome.
Au lieu de se mouvoir individuellement, les rouleaux sont reliés entre eux , ils se déplacent donc ensemble qu’ils soient ou non en prise sous la charge.
Le lien entre les rouleaux peut être très simple car il ne reçoit que des efforts très faibles qui ne sont pas reliés à la charge mais seulement au poids des rouleaux, il pourrait être par exemple fait d’un cordonnet enroulé glissant sur le tourillon dans l’axe du rouleau, cet enroulement pourraient être rigidifiés par de la résine.
L’astuce est de recycler automatiquement le rouleau qui s’échappe sur l’arrière du plateau en le faisant repasser devant en transformant le traîneau initial qui portait la charge en piste de roulement intermédiaire sur ses deux faces, la face inférieure transmettant la charge sur les rouleaux de portage, la face supérieure recevant le retour des rouleaux sans charge.
Le patin est conçu pour avoir toujours deux rouleaux en charge sous lui, plus serait inutile à cause du changement de pente en entrant ou sortant d’une rampe. De plus la longueur du patin ne devait pas excéder 0.5 m (voir chargement des pierres à la volée).
La partie inférieure du plateau intermédiaire doit être faite d’une plaque de cuivre avec les nervures de guidage des rouleaux, ainsi les rouleaux guidés par les rails trouveront leur place sur le plateau intermédiaire. Le reste du plateau peut bien être en bois, il n’a que de faibles contraintes de compression à tenir.
Du fait du contact quasi ponctuel du plot sur la nervure, le rouleau peut continuer à la suivre quand celle-ci présente un virage, assez large cependant. Le rouleau conduit par la nervure de la piste au sol, se met légèrement en travers en « montant » sur les nervures du plateau intermédiaire
Avec un entre-axes entre rouleaux de 11 cm, une longueur de rouleau de 20 cm et un entraxe entre plots de 16 cm, si l’on veut se limiter à 3 mm de débattement de l’extrémité du rouleau à l’intérieur du virage, il faut un rayon de braquage qui soit de l’ordre de 33 fois la longueur du rouleau soit ici 7 m. Comme il y a toujours deux rouleaux en charge, le débattement total sera de 6 mm, il y a dix rouleaux en série dans la chenille, il faudra donc un jeu minimum de 0.6 mm entre l’axe de fixation du lien sur le rouleau et le lien lui même, pour rendre ce déplacement possible sans impacter les autres rouleaux.
Néanmoins, dans le virage, les plots extérieurs et intérieurs au virage tournent ensemble, du coup le plot extérieur fait un parcours supérieur à celui de l’intérieur, il y a un glissement donc un frottement prend naissance qui se traduit par un freinage et une consommation d’énergie. Il y avait donc intérêt à lubrifier la piste dans les virages par du talc par exemple, pour que le coefficient de frottement du plot en granite ou diorite sur la piste en cuivre soit de l’ordre de 0.1 à 0.2. Avec un rayon de braquage faisant 40 fois l’entraxe des plots, le parcours en frottement fait 1 % du parcours total fait 45% de roulement et 55% de pivotement, l’ensemble de ces deux phénomènes conduit à une augmentation de la résistance à l’avancement finalement assez faible de 0.1 à 0.2 % dans le virage, valeurs à doubler puisque ce frottement a lieu en même temps sur la piste et sur le plateau intermédiaire.
On constate une fois encore que le bon fonctionnement de ce dispositif tient dans la précision d’execution.
Le bloc au dessus repose soit directement soit posé sur un plateau, sur une cale en bois qui est évidée pour laisser passer les rouleaux, cette cale ne travaille qu’à la compressions au droit de son appui sur le plateau intermédiaire.
Posé au dessus de la cale un double plateau à rotule probablement en cuivre avec une rotule en granite qui n’est autre qu’un plot un peu plus gros que ceux de roulement.
La partie concave de la rotule se situe sur le plateau inférieur probablement lubrifiée par du talc, cette articulation est nécessaire pour permettre au patin de s’orienter très légèrement dans les virages et dans les changements de pente
Dans cet exemple, le patin à plots autonome, est fait de 10 rouleaux de 20 cm de long, 10 cm de diamètre, avec des plots de 6 cm de diamètre pour le segment de sphère.
Chaque rouleau pèse 1.5 KG et peut supporter 2 t, deux rouleaux sont toujours en prise, le patin peut porter une charge de 2 × 2 = 4 tonnes.
Son encombrement hors tout est de 0.35 x 0.5 m au sol et 0.4 m en hauteur poids 40 Kg.
On comprend que les constructeurs disposaient d’un éventail très large d’options pour optimiser le transport des pierres, celles qui sont données ci-dessus ne sont là que pour illustrer un fonctionnement du système.
Maquette preuve du concept:
Erratum: sur la vidéo la mesure de la pente ne fait pas 1.6% mais 1.6° ce qui donne une pente de 3% et 5% quand la mesure donnait 3°
Exploitation du patin autonome:
Avec ce patin il n’est plus nécessaire de remplir les pistes de rouleaux, il faut disposer suivant leur taille, de deux minimum mais de préférence quatre patins sous les blocs en circulation.
Pour le plus grand nombre, les blocs de remplissage, il en circule en moyenne 480 par jour, mais avec le patin ils ont gagné en mobilité, car les blocs peuvent être lâchés seuls sur les pistes de progression à une vitesse choisie. Une fois le bloc mis en place sur l’assise les patins peuvent retourner seuls à vide au point de départ sur une autre piste parallèle, plus légère car ne supportant que le poids du patin.
Du fait que les patins fassent l’aller retour dans les ascenseurs, leur poids ne compte pas dans la consommation globale d’énergie des ascenseurs. De ce point de vue tout se passe comme si les blocs voyageaient sur un coussin d’air!
Par exemple sur les 400 m de liaison des carrières à la pyramide, les blocs peuvent circuler paisiblement à 4 KM / H et donc mettre 6 minutes pour faire le trajet.
On a sur le plateau de Gizeh deux stocks tampons contenant la consommation journalière, celui du jour et celui du lendemain, le matin celui du jour est plein, celui du lendemain est vide, le soir c’est le contraire, on a donc en cours de transit, la consommation journalière sur patins, le bloc moyen étant équipé de 4 patins de 10 rouleaux chacun, le stock journalier étant de 480 blocs, cela fait de l’ordre de 20 000 rouleaux en service sur le plateau de Gizeh et chacun disposant de 18 plots, 360 000 pierres de roulement / pivotement, pas étonnant que les musées en regorgent!
On dispose donc au départ des carrières un dispositif élévateur à flotteur submergé ou tout autre fosse élévatrice, qui élève les blocs d’une hauteur de 4 / 5 m, une partie de cette hauteur est consommées par une courte rampe qui accélère les blocs, puis 400 m de piste en légère pente pour compenser les pertes de roulement.
Les blocs se déplacent en toute autonomie à vitesse constante sur les 400 m du trajet et sont freinés par une rampe ascendant à l’arrivée du stock intermédiaire pour préparation du calepinage du lendemain.